La basilique Sacré-Cœur de Koekelberg à Bruxelles a refusé du monde hier. C’est en effet là qu’a été dite la messe pour le repos de l’âme d’Etienne Tshisekedi, décédé dans la capitale belge d’une embolie pulmonaire le 1er février 2017. L’office d’hier fait suite à trois veillées funéraires à l’issue desquelles le corps du vieil homme de 84 ans a été exposé pour permettre à la diaspora congolaise de lui rendre un dernier hommage.
Mais plus d’une semaine après la chute du baobab, on ne sait toujours pas si sa dépouille sera transférée au pays natal et pas davantage quand ses obsèques auront lieu. Aux prières et au recueillement effectués dans le calme de l’ancienne puissance coloniale, répond depuis Kinshasa une indécente polémique entre la famille biologique et surtout politique de l’illustre disparu d’une part, et, de l’autre, un gouvernement congolais gêné aux entournures. Il faut dire que les deux parties ont engagé des pourparlers pour trouver le modus operandi.
Mardi, elles semblaient avoir trouvé un terrain d’entente avec l’annonce par les autorités de la création d’une « commission spéciale chargée de l’organisation des funérailles de cette personnalité congolaise ». De même, un avion tout aussi spécial que la commission ad hoc devait rallier Bruxelles pour ramener la dépouille et les membres de la famille endeuillée. Mais si le palais du Peuple avait été choisi comme lieu d’exposition, celui de l’inhumation, lui, n’était pas déterminé et faisait toujours l’objet de tractations entre le gouverneur de la capitale et le clan Tshisekedi.
Autant de mesures battues en brèche par la famille politique avec à sa tête l’UDPS qui, après avoir canonisé son héros, exige « l’érection d’un mausolée au centre-ville de Kinshasa où sera gardé pour l’éternité le corps du père de la démocratie » ainsi que «La prise en charge de tous les frais liés aux obsèques par l’Etat congolais à travers le gouvernement de large union nationale en vue. »
Et voilà comment ce qui devait rester dans la sphère privée, nonobstant la carrure du défunt, devient un enjeu politique, pour ne pas dire une affaire d’Etat. Une belle pagaille qui n’honore pas la mémoire du Sphinx de Limeté. Mais comment pouvait-il en être autrement vu le contexte dans lequel son décès est survenu. « Ya Tshitshi » s’en est allé, on le sait, au moment où son pays traverse une délicate situation née du fait qu’à la fin de son ultime mandat, Joseph Kabila a préféré jouer les prolongations au lieu de céder la place à un successeur démocratiquement élu. C’est ce qui a conduit à la médiation de la Conférence épiscopale.
Après d’âpres négociations, un compromis sera trouvé le 31 décembre 2016. C’est l’accord de la Saint-Sylvestre dont la mise en œuvre s’avère des plus laborieuses. Du coup, ces obsèques ne pouvaient qu’être éminemment politiques. Mais à l’allure où vont les choses, on se demande quand elles pourront avoir lieu et surtout si à leur occasion le défunt n’emmènera pas avec lui d’autres cadavres, tant les positions restent tranchées et la tension exacerbée.
H. Marie Ouédraogo
L'Observateur paalga |