Crise Arabie Saoudite / Qatar : L’Afrique gagnée par le panurgisme diplomatique PDF Imprimer Envoyer
Écrit par L'Observateur paalga   
Vendredi, 09 Juin 2017 09:07

C’est à de véritables tirs groupés contre le Qatar que l’on assiste depuis le début de la semaine. Après l’annonce fracassante faite par l’Arabie saoudite de la rupture de ses relations diplomatiques avec le petit Etat gazier du golfe, il y a comme une forme de panurgisme diplomatique qui s’est emparée de bien des capitales arabo-musulmanes, puisqu’à la suite de Ryad, d’autres capitales de la région ont emboîté le pas au roi Salman. Ainsi, l’Egypte, le Yémen, Bahreïn, les Emirats Arabes Unis et le gouvernement dissident libyen de Baïda se liguent contre leur voisin désormais devenu infréquentable.

Et le péché jugé inexpiable de l’émir, cheikh Tamim Ben Hamad Al-Thani, une complaisance suspecte à l’égard des islamistes, pour ne pas dire son soutien aux organisations terroristes et la propagation d’idées extrémistes, sans oublier un rapprochement de mauvais aloi avec Téhéran. Il est vrai que depuis de longues années la monarchie gazière est suspectée d’alimenter la multinationale du terrorisme souvent sous le couvert d’une certaine fraternité islamique et d’œuvres de charité qui cachent bien mal l’endoctrinement qui fait le lit du djihadisme à travers le monde.

 

Pour autant cette mise subite au ban de la communauté internationale reste assez suspecte. Et l’on ne peut s’empêcher de penser que quelque part c’est le président américain qui a allumé la mèche quand, lors du Conseil de coopération du Golfe tenu à Ryad le 21 mai dernier, il a appelé à « chasser » les extrémistes et les « terroristes » demandant par ailleurs à la communauté internationale « d’isoler » l’Iran. Un pyromane qui se pique aujourd’hui de jouer les pompiers, puisqu’il propose une médiation pour dénouer la crise dont cette région, déjà réceptacle de vives tensions, n’a vraiment pas besoin. Si l’actuel locataire de la Maison-Blanche en est réellement à l’origine, la manœuvre manque cruellement de lisibilité quand on sait que le Qatar, qui se considère comme un allier de longue date des Etats-Unis, abrite sur son sol les infrastructures d’Al Udeid, l’une des plus grandes bases militaires américaines au monde.

Chose inhabituelle, les pays africains, qui d’habitude se gardent de mettre les pieds dans ce bourbier proche et moyen oriental sur fond de rivalités séculaires et de haines recuites entre Chiites et Sunnites, ont, eux aussi, embrayé à la suite du royaume wahhabite. Il y a ceux qui, comme la Mauritanie et les Comores, ont décidé de rompre avec Doha ; ceux qui, à l’instar du Tchad et du Sénégal, ont rappelé leur ambassadeur pour « consultation » ou encore les pays tels que Djibouti qui se sont contentés de réduire leur représentation diplomatique. A l’inverse, ils sont quelques-uns qui, comme le Soudan ou la Somalie, en appellent au dialogue entre les différentes parties. Autant de réactions qu’il faut lire à l’aulne des intérêts des Etats concernés.

En vérité dans cette affaire, ce qui est le plus problématique, c’est moins la mise à l’index du Qatar, que l’identité du principal accusateur. Car tout de même ! le royaume des Saoud n’est pas aussi blanc que neige en matière d’intégrisme religieux, lui qui veut distiller un islam rigoriste aux quatre coins de la planète dans une sanglante querelle de minarets ; lui qui a enfanté et parfois même couvé Ben Laden, jouant un double jeu au grand dam des Américains est aujourd’hui très mal placé pour mettre son voisin en accusation. Il faut donc rechercher les vraies raisons de cette colère wahhabite ailleurs que dans la seule volonté de lutter contre le terrorisme international et les Africains devraient se garder de prendre partie dans une affaire dont ils ne maîtrisent pas tous les arcanes.

 

H. Marie Ouédraogo

L'Observateur paalga

Mise à jour le Vendredi, 09 Juin 2017 09:13
 

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