Le VIIe congrès ordinaire du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), tenu les 5 et 6 mai 2018 au Palais des sports de Ouaga 2000, a consacré la réélection d’Eddie Komboïgo à la tête du parti . Il a triomphé au vote, par 39 voix contre 33, face à l’ancien ministre de la Justice, Boureima Badini.
Faute de consensus, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) a dû recourir, dans la nuit du 5 au 6 mai 2018, au vote à bulletin secret, pour élire un nouveau président. Le parti, créé en 1996 par l’ancien chef de l’Etat, Blaise Compaoré, a satisfait de cette manière, à une exigence de son VIIe congrès ordinaire, une première dans son histoire. Toutefois, il n y a pas eu de chamboulement à ce scrutin uninominal à un tour, puisque Eddie Komboïgo, à la tête du CDP depuis 2015, a rempilé, en obtenant 39 voix contre 33 pour son adversaire, l’ex-Garde des Sceaux, Boureima Badini, absent à la clôture du congrès. Tout avait pourtant été mis dans la balance, selon certaines sources internes au parti, pour que les deux ténors ne s’affrontent pas, après que les 17 autres candidats en lice se sont désistés . Le destin en a voulu autrement, et à l’annonce de son sacre, au terme des travaux, l’heureux n’a pas boudé son plaisir . L’expert-comptable s’est offert un bain de foule dans la cuvette du palais des sports de Ouaga 2000, comme les dirigeants populistes en raffolent, sous les acclamations nourries des 3200 congressistes issus des quatre vents du Burkina et de la diaspora . Pour M. Komboïgo, qui a reçu le flambeau du parti, sa réélection constitue « une leçon de démocratie à la face du monde ».
Le président du CDP a alors traduit, avec « émotion » et « humilité », sa reconnaissance aux militants pour cette confiance renouvelée. « Nous allons engager avec une grande détermination la modernisation de notre parti pour le rendre en phase avec ses ambitions. Dès le prochain Bureau politique national (BPN), nous présenterons le chronogramme des grands chantiers que nous entreprendrons dans les trois années à venir », a-t-il signifié, insistant sur sa volonté de « préserver » la cohésion et l’unité du CDP. Pour lui, la voie que le CDP doit désormais emprunter pour atteindre ses objectifs a été tracée à ce congrès, en ce sens que le parti s’est doté d’outils et d’instruments « nécessaires » pour son fonctionnement efficace. Il a fait allusion en premier lieu, au renouvellement du Bureau exécutif national (BEN), fort d’une centaine de membres qu’il aura à conduire et du Haut conseil du parti, dont fait partie Léonce Koné. Cet autre ponte du parti n’a pas été aussi témoin de la clôture des travaux du congrès, tout comme Juliette Bonkoungou, qui fait partie des candidats au poste de président ayant jeté l’éponge.
Le BEN pourrait connaitre d’ailleurs des réajustements, comme le souhaite Eddie Komboïgo, pour peut-être prendre en compte son challenger malheureux, qui ne joue pas un rôle au sein de cet organe. Quoiqu’il en soit, le patron du CDP se montre ambitieux, malgré les « tentatives de déstabilisation » du régime en place. «Reconquérir le pouvoir d’Etat est maintenant notre objectif. Aucun obstacle ne nous empêche désormais d’assumer pleinement notre rôle dans l’évolution sociopolitique de notre pays (…)», a-t-il affirmé.
Blaise Compaoré fait président d’honneur
Outre l’élection du président du parti, les congressistes se sont penchés sur sa place et son rôle dans l’évolution sociopolitique récente du Burkina Faso, marquée par la Transition et l’avènement au pouvoir du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), conformément au thème du congrès. Il est ressorti que le CDP assume son statut de parti d’opposition, depuis la perte du pouvoir en 2014, suite à l’insurrection populaire. La formation d’Eddie Komboïgo, ont noté les congressistes, constitue de nos jours la 3e force politique du pays, avec 18 députés et 2150 conseillers municipaux. Une position acquise grâce à un certain nombre d’atouts : forte représentation sur le territoire national, disponibilité d’une base électorale large, existence de personnes-ressources, etc. Cependant, les militants se sont rendus à l’évidence que le CDP traîne des faiblesses plus ou moins liées à la perte du pouvoir. Il s’agit, entre autres, des cas d’indiscipline, du départ de militants « pas prêts » à vivre les réalités de l’opposition et des procès d’intention et de persécution contre certains militants. En tout état de cause, les congressistes ont identifié des défis à relever par le CDP à l’avenir en termes de gouvernance. Ce sont, parmi tant d’autres, la préservation de la cohésion sociale, le respect des principes organisationnels, le renforcement de la place des jeunes et des femmes au sein du parti et l’achèvement de la mise en place des structures en cours. Pour un CDP plus fort, les congressistes ont fait des propositions allant dans le sens de la consolidation des organes tels que le BPN et le BEN, par l’augmentation du nombre de leurs membres. La réhabilitation « sans délai » du siège du parti, sis à l’avenue Kwame Nkrumah, saccagé lors de l’insurrection populaire, tient également à cœur les militants. Mais d’ores et déjà, le congrès a acté la création d’une commission permanente chargée de la gestion et du suivi des cadres du parti. Aussi, l’instance a-t-elle renforcé le contrôle du fondateur sur le CDP, par l’adoption d’une résolution l’élevant au rang de « président d’honneur », pour son « leadership éclairé ». Ce poste hors hiérarchie confère des prérogatives à l’ancien président du Faso, qui pourra fixer les grandes orientations et options stratégiques du parti, ou encore valider le choix de son candidat à la fonction suprême.
Kader Patrick KARANTAO
Sidwaya |