S’il y a, par ces temps qui courent, un sujet qui semble passionner les Burkinabè, c’est bien celui d’une éventuelle extradition de l’ex-président Blaise Compaoré, présentement réfugié au Maroc. Et cela d’autant plus qu’en l’espace d’une semaine, les deux têtes de l’exécutif de Transition, à savoir le président Michel Kafando et le Premier ministre Yacouba Isaac Zida, auront tour à tour abordé la question.
On retiendra que c’est d’abord le lieutenant-colonel Yacouba Isaac Zida qui, jeudi dernier lors d’un point de presse avec quelques médias, a indiqué que «si au niveau de la justice il y a une plainte déposée contre le président Compaoré (…), je pense que nous allons demander au Maroc de mettre le président Compaoré à la disposition de la justice burkinabè».
Quelques jours plus tard, c'est-à-dire ce lundi, dans une interview accordée cette fois à nos confrères de France 24, le président Michel Kafando, sur le même sujet, a quant à lui déclaré que «c’est un dossier qui n’est pas très urgent. Parce qu’il faut prendre le temps de comprendre beaucoup de choses, il faut prendre le temps de voir les documents, il faut prendre le temps de resituer les responsabilités».
A première vue et à première vue seulement, il existe comme une dichotomie entre les propos du chef de l’Etat et ceux de son Premier ministre. C’est en tout cas ce que certains observateurs de la scène politique n’auront pas manqué de constater.
Mais dans le fond, il faut bien admettre que les deux têtes de l’exécutif sont sur la même longueur d’ondes, même si l’une n’en a pas fait une des priorités de la Transition et que l’autre a assorti son propos de la condition «si».
Alors si au sommet de l’Etat on regarde dans la même direction et que l’harmonie règne au sein de la nouvelle équipe, comme on en a vu le symbole du président et du Premier ministre main dans la main hier lors des obsèques des martyrs des 30 et 31 octobre, que demande le peuple ?
Il faudra cependant travailler à maintenir cette convergence de vues pour que l’attelage sur lequel les Burkinabè fondent tous leurs espoirs ne soit pas tenté de ruer à hue et à dia.
Il faut surtout éviter la pléthore des effets d’annonce et autres promesses qui, pour être populaires, n’en sont pas moins ambitieux, pour ne pas dire difficiles à mettre en œuvre en l’espace de la seule année impartie à la Transition.
Qu’il s’agisse de la lutte contre la corruption, de nationalisations d’entreprises ou de la loi sur le délit d’apparence, beaucoup de promesses ont été faites qui touchent vraiment aux aspirations légitimes des Burkinabè épris de justice sociale et de justice tout court.
C’est bien beau tout ça, mais quand on sait qu’il faut abattre un tel travail en seulement 12 mois, on se demande comment exécuter tant de chantiers sans tomber dans le piège béant de la démagogie ou de la déception des promesses non tenues à l’heure du bilan, cela d’autant plus que la priorité des priorités reste aujourd’hui le retour à une vie constitutionnelle normale ; autrement dit l’organisation d’élections libres, transparentes et équitables, à commencer par la présidentielle et ce, dans les délais prescrits par la Charte.
Marie Ouédraogo
L'Observateur paalga |