Les forces de gendarmerie de la région de l’Est viennent de démanteler des réseaux de délinquants qui opéraient dans la zone. Ces derniers, qui braquaient leurs victimes sur les voies ou à domicile, ont été présentés à la presse au sein de la Brigade territoriale de Fada le mercredi 18 février 2015. Le constat est accablant : nonobstant les efforts presque surhumains des forces de l’ordre pour endiguer le mal, l’Est du Burkina, difficile à couvrir du point de vue sécuritaire, s’apparente à l’Ouest américain à l’époque où il n’y avait que la cavalerie qui arrivait généralement en retard.
La voix étreinte par l’émotion, le quinquagénaire Ounteni Thiombiano ne tarissait pas de remerciements et de bénédictions à l’endroit de ceux qui lui ont permis de retrouver sa moto. «Je suis trop heureux ! Je bénis la Gendarmerie. Que mes ennemis aillent en Enfer ! », s’époumonait-il les mains nerveusement accrochées au guidon de sa monture.
Son passé récent permet de comprendre son émotion: il y a deux semaines de cela, il dormait avec sa famille quand des individus cagoulés ont envahi sa cour, lui demandant où il avait caché son argent. Répondant qu’il n’en avait point, il eut juste le temps, à l’aide de son bras, de parer un coup de machette qui visait sa tête. On lui intima alors l’ordre de sortir sa moto. Ce qu’il fit sans se faire trop prier.
Ce mercredi 18 février, à la Brigade régionale de Gendarmerie de Fada N’Gourma, la douleur posttraumatique de la victime, dont un bras porte encore les traces de l’agression, est moins vive. A pris place, une certaine délivrance. Malheureusement, ce genre de happy-end n’est pas fréquent et les attaques du genre sont légion dans la région de l’Est qui comprend les provinces de la Gnagna, du Gourma, de la Komondjari, de la Kompienga et de la Tapoa.
Le 25 janvier dernier, une attaque à main armée était perpétrée par des délinquants armés de fusils de chasse, à 40 kilomètres de Matiacoali. Un usager du nom de Banyoa Tankoano, boutiquier, a été abattu par lesdits délinquants, car n’ayant pas obtempéré à l’ordre d’arrêt. Quatre jours plus tard, c’est-à-dire le 29 janvier, une autre attaque à main armée est survenue sur l’axe routier Fada-Pama.
Un jeune homme, âgé de vingt ans et passager d’un minibus bus objet de braquage ce jour-là, a trouvé la mort. A l’instar de ces cas de braquage sur les voies publiques, des attaques sont perpétrées dans des domiciles au cours desquelles des biens sont emportés et des vies ôtées.
Et comme pour abonder dans le même sens que le dicton qui dit que « plusieurs jours pour le voleur, un jour pour le propriétaire », la Gendarmerie de la région a démantelé quatre réseaux de délinquants avec dix individus interpelés.
Ces derniers ont du reste été présentés à la presse mercredi dernier à la Brigade régionale de Fada. La Brigade territoriale de Pama s’y est également rendue pour présenter sa part de malfrats tombés dans les mailles de ses filets.
Le mode opératoire de ces hors-la-loi est effrayant : il consiste en un premier temps à cibler des motocyclettes à l’état neuf et les citoyens ayant en leur possession de fortes sommes d’argent provenant de la vente de coton, de sésame ou de bétail et, ensuite, déposséder leur cible de leurs biens, de jour comme de nuit. En plus inquiétant, au cours de leur progression, ils attaquent et dépossèdent tout usager de la route qu’ils rencontrent sur leur chemin.
Et des scènes des plus humiliantes, des usagers les ont vécues, surtout lorsque l’agresseur n’a pas le butin espéré. Ce n’est pas cet infortuné usager qui dira le contraire, lui qui n’avait pas d’argent sur lui et à qui il a été sommé d’ingurgiter les six kilos de sésame qu’il détenait.
Le constat est patent : dans l’Est du Burkina, les agressions sont légion. Mais qu’est-ce qui pourrait bien expliquer cet état de fait ? se sont demandé bien des visiteurs.
Pour les responsables de services de gendarmerie de la zone, les facteurs suivants sont favorisants : région la plus vaste du Burkina (Ndlr : avec ses 46 694 km2, la région de l’Est est nettement plus vaste que la Belgique qui fait 30 528 km2), insuffisance de postes de sécurité qui fait qu’il y a souvent une centaine de kilomètres entre deux sous-unités, gigantisme des forêts classées, etc.
Le hic dans toute cette affaire est que parmi les délinquants appréhendés et présentés à la presse mercredi dernier dans la capitale du Gourma, il y en a qui sont des repris de justice, connus par les services de gendarmerie et fichés.
Fort heureusement, le Procureur du Faso de la région, Blaise Bazié, qui était présent à la cérémonie, a été interpellé sur la question. Il a tenté la réponse qui suit, même si véritablement l’homme de droit n’a pas beaucoup convaincu : «Ce n’est pas que la justice libère le prévenu. Le juge est mû par des principes que la population ne comprend souvent pas. Lorsque nous sommes saisis de pareille situation, c’est la présomption d’innocence qui prévaut. Elle est sacrée et quand il n’y a pas suffisamment de preuves, l’on ne peut que libérer la personne».
Issa K. Barry L'Observateur paalga
Vu et entendu
Chèque attend propriétaire
L’insécurité est si prégnante à l’Est que des cotonculteurs préfèrent laisser leurs chèques aux sociétés d’achat de la fibre. Une fois qu’ils le touchaient, les braqueurs, aussitôt informés, tomberaient à bras raccourcis sur eux. Il s’en trouve même qui vous préviennent qu’ils viendront vous dire bonjour.
Un élève braqueur
L’histoire de ce collégien qui agressait à l’aide d’un gourdin nous a été racontée par un pandore. Et dans sa tenue de scolaire s’il vous plaît ! Il assommait ses victimes, notamment les dames fonctionnaires, sur la route de leur lointain service. Le chenapan s’emparait ensuite de leurs biens, avec une prédilection pour les téléphones portables. Malheureusement, il a été un jour reconnu et dénoncé par une enseignante.
Interpellation, mode d’emploi
Pour ratisser large, les gendarmes de la zone circulent à moto. Comment s’y prennent-ils pour interpeler un présumé délinquant ? Il est placé en sandwich, un bras entravé par une menotte reliée au cadre de la selle. Et c’est parti pour une distance de plusieurs dizaines de kilomètres à travers la brousse à parcourir. On imagine les risques encourus.
La fausse alerte d’un ivrogne
Un jour, vers 1 heure du matin à Fada, la gendarmerie a été alertée que tout un village était attaqué. C’était le branle-bas de combat avec une mobilisation de presque tout l’effectif pour secourir les populations. Arrivé dans le bled en question, tous les habitants dormaient. L’appelant, saoul comme une bourrique, vint vers les gendarmes et les informa qu’il les a alertés parce qu’il voulait rentrer chez lui et qu’il avait très peur.
Amulettes, quand tu nous tiens !
Dans l’arsenal de guerre récupéré chez les bandits, il y avait des amulettes certainement censées les prémunir du mauvais sort. «Est-ce que ça marche? », s’est hasardé un journaliste. « Nous sommes des Africains, on sait ce que cela représente pour ceux qui en portent. Mais il est clair que dès qu’on arrive à arrêter quelqu’un, c’est que ça n’a pas marché », a fait constater sans rire un commandant de Brigade.
Du lion, qui n’a pas fait l’unanimité
Jeudi dernier, ils étaient bien chanceux, ces visiteurs du campement de Konkombori (commune rurale de Madjoari dans la province de la Kompienga). La veille, un buffle et un lion avaient été abattus. Et l’on imagine bien que ceux qui n’avaient vu le roi de la brousse qu’en image trépignaient d’impatience de voir ses restes et salivaient à l’idée de goûter à sa chair. Beaucoup ont ét�� cependant déçus. Comme quoi, viande savoureuse et renommée ne vont pas forcément de pair !
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