La saison des grèves et mouvements de protestation, pour ne pas dire des sautes d’humeur, bat son plein au Pays des hommes intègres. En effet, depuis le début de l’année on assiste à une intensification et à une quasi-institutionnalisation de la gouvernance par la rue. Dernier épisode en date, le blocus des principales routes nationales du pays hier lundi 30 mars 2015 par l’Union des chauffeurs et transporteurs routiers du Burkina pour, disent-ils, revendiquer l’application et l’extension de la convention collective sectorielle du transport.
Le désordre et l’anarchie qui couvaient déjà à la fin du régime Compaoré ont-ils trouvé un terreau en cette période postinsurrection ? Depuis les événements de fin octobre 2014, on assiste régulièrement et impuissant à des mouvements sociaux dans tous les sens et dans tous les secteurs, paralysant parfois des pans entiers de l’économie nationale.
Saccages d’installations minières, séquestration de responsables d’école internationale, grèves plus ou moins sauvages, chasse à l’homme... Il ne se passe presque plus une semaine sans qu’ici et là on enregistre ce type de manifestations.
La dernière en date de cette éruption sociale est la grève de 48 heures enclenchée les 30 et 31 mars 2015 par l’Union des chauffeurs et transporteurs routiers du Burkina (URCB) pour protester contre la non-application et la non-extension de la convention collective sectorielle du transport routier, signée depuis décembre 2011.
Il ne s’est pas agi uniquement d’une grève du volant, puisque les manifestants ont bloqué certaines routes nationales, perturbant ainsi le trafic et provoquant des bouchons monstres à certaines artères des grandes villes comme Ouagadougou et Bobo.
Seuls les ambulances, les camions transportant des produits périssables et les véhicules commis à l’enrôlement biométrique étaient épargnés par les croquants, surexcités. Dans un face-à-face tendu avec les forces de l’ordre et de sécurité, celles-ci ont d’ailleurs dû engager une course-poursuite et utiliser des gaz lacrymogènes aux postes de péage de Kaya et de Pô pour dégager les voies. La manifestation se poursuit en principe aujourd’hui avec une marche-meeting à Ouagadougou.
Espérons que ce mouvement d’humeur ne paralysera pas davantage l’activité économique, déjà morose. Hier, les informations glanées ça et là faisaient état d’une possible perturbation des approvisionnements en hydrocarbures de la SONABEL.
Jean Stéphane Ouédraogo
Communique Sonabel
Par suite de difficultés d’approvisionnement en combustible des centrales de la Sonabel, consécutives à une grève des chauffeurs du Burkina, la fourniture de l’électricité connaîtra une forte perturbation dans la mesure où certaines centrales seront à l’arrêt faute de carburant.
La Sonabel présente ses excuses à la clientèle pour les désagréments découlent de cette situation indépendante de sa volonté.
Le département communication
Toutes les voies d’accès à Bobo obstruées
Le transport interurbain a été littéralement paralysé hier lundi 30 mars 2015 à Bobo-Dioulasso. Toutes les principales voies d’accès à la ville ont été fermées à la circulation par des transporteurs de l’Union des chauffeurs routiers du Burkina (UCRB) qui dénoncent le traitement « inhumain et dégradant » dont ils disent être victimes de la part de leurs employeurs. Jusqu’en début d’après-midi, la situation ne s’était guère améliorée sur certaines artères où des barricades avaient été érigées par les transporteurs en colère.
Ce fut une journée à haut risque pour de nombreux automobilistes de la ville de Sya. Les usagers de la route se devaient de décliner leur identité et leur fonction devant des manifestants surexcités qui s’étaient rendus maîtres de la route sur de nombreuses artères pour circuler.
Etaient donc autorisés à poursuivre leur chemin les conducteurs au volant de leur véhicule privé, mais la route était barrée aux propriétaires de véhicules avec à bord un chauffeur. «C’est une grève de tous les chauffeurs du Burkina. O
n va arrêter tous ceux qui ne vont pas appliquer notre mot d’ordre de grève», nous dit un des responsables de la manif, bavant littéralement de colère.
Le mouvement, qui a commencé tôt le matin a surpris de nombreux transporteurs avec leurs marchandises ou leurs passagers sur les principaux axes interurbains, et ils étaient obligés de se soumettre aux injonctions des manifestants qui les forçaient à immobiliser leur véhicule sur le bas-côté de la chaussée.
Commence alors une attente qui a duré toute la journée d’hier et qui a provoqué ainsi une longue file de véhicules stationnés aux abords des routes nationales dans les deux sens. Du coup, la circulation était infernale à certains endroits avec ces mastodontes de la route qui obstruaient le passage.
A l’origine de ce mouvement, des revendications corporatistes des chauffeurs routiers. Certains d’entre eux que nous avons rencontrés sur place au rond-point de l’aéroport affirment être victimes d’une injustice et d’une exploitation de leur patron.
Cette grève, disent-ils, vise à exiger de leurs employeurs leur affiliation à la CNSS, l’augmentation de leur salaire et l’adoption de nouvelles mesures pour l’amélioration de leurs conditions de travail.
A cela s’ajoute l’application de la convention collective signée en décembre 2011 et qui porte sur les facilités d’accès au permis de catégorie E, le respect du principe de la libre circulation des personnes et des biens dans l’espace UEMOA et la résolution immédiate des difficultés liées au poste de contrôle juxtaposé de Cinkansé.
Visiblement très remontés contre les autorités administratives, les routiers du Burkina s’estiment brimés et exploités sans que rien soit fait, à leurs dires, pour leur assurer de meilleures conditions de vie et de travail.
Le moins que l’on puisse dire est que le mouvement d’hier aura certainement eu des conséquences fâcheuses chez les habitants de Sya ; eux qui ont été privés de leurs principaux moyens de déplacement en ville que sont les taxis et les tricycles.
Jonas Apollinaire Kaboré
Observateur paalga
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