PMU’B : Ces fortunés aux fortunes diverses PDF Imprimer Envoyer
Écrit par Sidwaya   
Vendredi, 16 Décembre 2016 09:07

Le Pari mutuel urbain burkinabè (PMU’B) fait régulièrement  des millionnaires,  aux fortunes bien diverses. Sidwaya est parti sur les traces de quelques gagnants. La réussite n’a pas toujours été au rendez-vous au royaume de l’argent-roi !

Madi Semdé, 27 ans, habitant au secteur n°6 de Koudougou, n’oubliera  jamais la date du 21 août 2015. C’est ce jour que la chance lui a souri au Pari mutuel urbain burkinabè (PMU’B), au point de lui ouvrir les portes du cercle restreint  des  millionnaires. Sa mise de 900 francs CFA au quinté (4+1) lui a rapporté la somme de 84 millions de francs CFA, au  moment  même où  il  venait  de perdre son emploi de soudeur. Coup du destin ?  L’heureux gagnant évoque tout  simplement  la chance.  «C’est  la chance, qui m’a  habité ce jour-là. C’était la première fois que je gagnais une telle somme, depuis 2012 que je  joue au PMUB.   Auparavant,  je ne gagnais que des petites sommes de l’ordre de 15 000 ou 20 000 francs CFA»,  raconte  Madi  Semdé, le triomphe modeste.  Ce veinard  dit  tenir  la passion du  PMU’B  de son désormais  ex-patron dans la soudure, un habitué des paris. «Le patron nous envoyait régulièrement  chercher  le programme hippique ou   faire des mises.  C’est  ainsi  que je me suis mis dans la danse»,  se souvient-il,  tout  sourire.  L’élève a donc  dépassé le maître,  en  réussissant  à faire fortune,  grâce à la divine providence.

 

Au  point de  faire rêver   follement  tous ces parieurs qui squattent,  jour et nuit, les kiosques PMU’B et autres Espaces courses en  direct (ECD), à la  recherche  de la fortune.  Malgré  sa richesse pour le moins subite,  Madi Semdé dit n’avoir pas changé de comportement.  «Je  suis resté égal à moi-même,  dans ma modestie.  Quand j’ai gagné,  je n’ai  pas volé aux anges»,  confie-t-il,  le  regard  perdu  dans le vide.  Il  faut   rencontrer  ce   jeune parieur pour se convaincre de ses  dires.  Quand  nous  allions  à son contact, pour  la première  fois, le 12 août  2016,  il  avait  plutôt   l’air   d’un  clochard que l’apparence d’un jeune  premier au compte en banque bourré. Tapettes, pantalon bleu défraichi aux bas défaufilés et sales, chemise carrelée  au col mal dressé, Madi Semdé ne donnait pas du tout l’impression   d’être  un  millionnaire.  Mais, ainsi  est  la philosophie de ce célibataire sans enfant  qui s’emploie  à investir  qu’à faire la belle  vie  comme certains jeunes de  son âge.  «J’ai acheté un  terrain, au secteur n°6 de Koudougou, non loin de la concession  familiale, sur lequel j’ai construit ma propre maison. J’ai également  acquis  deux parcelles jumelées à 11, 5 millions  au secteur   n°8 de Koudougou.  Sans  oublier la moto que je me suis offerte», dévoile-t-il.

La sécurisation de sa fortune lui tient tellement  à cœur  que Madi  a fait  un compte bloqué de 40 millions de francs CFA pour une période de cinq ans (2015-2020) dans une banque de la place. Le  taux d’intérêt annuel de cette opération est  de 3, 75%, comme  l’attestent  le document  bancaire présenté à  Sidwaya. En attendant de récolter les dividendes de ce placement,  Madi Semdé  suit  une formation  en confection de portes vitrées.  «En tant que soudeur,  j’aimerais maîtriser  la fabrication des portes vitrées qui rapportent  plus d’argent.  J’ai versé la somme de 25 000 francs CFA   à un atelier de soudure au secteur n°8 de Koudougou pour  suivre cette  formation. A terme, je vais ouvrir mon propre atelier  de  soudure»,  soutient le millionnaire. S’il tient à exceller dans son métier, ce parieur  espère  gagner  d’autres millions au PMU’B.  «Je continue de jouer, car la chance  peut encore  me sourire»,  avance-t-il, l’air enjoué. Son  père, le centenaire  Lallé Semdé, ne cache pas  sa  fierté d’avoir Madi comme fils.  «Je suis très content  pour Madi, à qui je fais confiance pour gérer  sa  fortune. Il n’est pas du genre à dilapider  des  sous dans l’alcool ou dans les  femmes»,   révèle  cet ancien marchand  de cola, au sujet de son rejeton.

 

Des investissements à la pelle

Tout comme Madi  Semdé, Edmond  Sawadogo, 35 ans, père de trois enfants,   habitant  de Nioko  n°1  à la périphérie  Est de Ouagadougou,  a aussi eu la «baraka» en  mai 2014.  Sa mise de 3 600 francs CFA à un quinté lui  a permis  de gagner 65,7 millions de francs CFA.   A l’époque,   il  travaillait  comme boucher avec son  frère, pour une paie mensuelle de 15 000 francs CFA. «Quand les résultats sont tombés, j’avais la bonne combinaison dans l’ordre, et je ne me l’imaginais pas.   J’étais content, mais  quelque part  la peur  m’habitait.  La gestion d’une telle somme, pour ne pas retomber  dans la misère  me taraudait l’esprit»,  se remémore  Edmond Sawadogo.  Pour autant,  il  s’est  vite  ressaisi   et  a  investi  son  gain dans l’immobilier,  pour  s’assurer  des lendemains  meilleurs.  Il dit avoir  acheté, en premier lieu, un terrain   non  loti   pour construire  sa  maison de deux chambres- salon.  Edmond Sawadogo  a  aussi  acquis un  célibaterium à Nioko n°1, composé de trois chambres-salon et d’une  maison, à plus de 20  millions de francs CFA,  qu’il a mis  en  location.  Il  affirme avoir érigé deux-mini villas à Nagrin, un autre quartier périphérique de la capitale, à une vingtaine de millions de francs CFA.  Ces  maisons,  souligne-t-il, sont  également   en location. Ce fan  de  paris hippiques, inspiré par un voisin en 2006, a  aussi investi pour ses proches,  notamment  pour  sa concubine,  Alimata Zida  et  son  petit-frère.  Il a financé la réalisation  d’un café-restaurant   pour  sa  dulcinée et  d’une quincaillerie pour  son  frère cadet à Pouytenga.  «Je suis  très content  de ce que  mon mari  a  réalisé.  J’ai bénéficié d’un kiosque et  je m’en sors  un  peu»,  confie  Alimata Zida. Edmond  Sawadogo, lui,  ne  vit  plus  l’euphorie des premiers moments : «Je n’ai plus grand-chose après ces investissements.  Je  vis  maintenant  des revenus de mes maisons en location».  N’empêche,  certains  parieurs,  qui le connaissent  bien,  ne  lui prêtent  aucun  bien  de nos jours, estimant  qu’il  a dilapidé sa  fortune.  «Les ragots à mon sujet ne me font ni chaud ni  froid. C’est de la pure jalousie», réagi-t-il.  Il  admet tout de même que les rumeurs proviennent  peut-être du fait qu’il a mis  le célibatérium  de Nioko n°1 en vente, pour rembourser un prêt de 4 millions de francs CFA contracté auprès d’une connaissance.

M.T., transporteur international de carburant basé à Ouagadougou,  semble avoir plus de chance que Madi et Edmond.  Il a   remporté  la somme de 130 millions de  francs  CFA à un quinté en  2015,  après une mise de 151 000 francs  CFA.  Mais  il se refuse à tout  contact   avec  la presse.  C’est  son  mandant  et  jeune frère,  également  discret,  I.T., qui se  livre  aux confidences.  «Nous  étions  tous contents  en son  temps  pour  notre frère  qui  a  eu  une  forte somme.  Le PMU’B, c’est  une question d’intuition et de chance»,  se souvient  I.T. qui  a aussi  gagné 34 millions de francs CFA en  2004.  A  l’entendre,  la centaine de «briques» a servi  à l’achat d’une maison  de  35 millions de francs CFA et au  renforcement de  l’activité de son  frère  qui a acheté une citerne de 30 millions de francs CFA et autres équipements.

 

Le revers de la fortune

Ce n’est pas tout !  I.T., également transporteur de carburant,  dit  avoir profité du gain, puisque son aîné  lui a offert une carrosserie de remorque d’une valeur de 10 millions de francs CFA.  Les autres membres de la famille, estimés  à une  vingtaine,  à l’en croire,  en ont  aussi joui.  «Dans  notre famille,  nous avons la chance  avec les jeux de hasard. C’est  l’impression que j’ai»,  a  soutenu  I.T.,  très peu  bavard.

Si certains  millionnaires du PMU’B ont su saisir  cette chance pour ne plus retomber dans la misère,  ce n’est pas le cas chez d’autres, qui ont  tout perdu ou presque. Seulement, il est difficile  d’arracher une confidence  aux gagnants qui n’ont pas su sécuriser leur argent. La plupart de ces infortunés font profil  bas et préfèrent  se tenir à l’abri des regards indiscrets et des sollicitations des journalistes. Seul l’un d’entre eux a accepté s’ouvrir laconiquement,  sous  le couvert strict de l’anonymat.  «J’avais eu des millions qui m’ont servi  à acheter  des maisons.  Mais j’ai fini par tout revendre, je n’ai plus rien.  Je ne sais pas ce qui m’arrive.  C’est étrange»,  a confié  ce gagnant noyé à présent dans le chagrin. Il dit s’interroger  inlassablement sur son  sort.  L’expérience amère de ce  parieur,  tout  comme d’autres d’ailleurs,  n’étonne guère l’enseignant-chercheur au département de sociologie de l’Université Ouaga I Pr Joseph-Ki-Zerbo de Ouagadougou, Boniface Désiré Somé.  «Le gain arrive très souvent   dans des conditions  de troubles psychologiques, car,  on ne s’y est pas préparé. Quand on aspire à avoir gros, on n’est pas  forcément un bon  gestionnaire.   D’où  le constat que des gros millionnaires  deviennent  des  indigents, puisque ne s’étant  pas  préparés à gérer une fortune», argue-t-il. Que l’on réussisse ou pas après avoir  gagné des millions,  le  PMU’B  apparaît, à ses  yeux,  comme une sorte d’exutoire pour les populations confrontées aux difficultés quotidiennes. «C’est une forme moderne du pari mutuel, qui a toujours existé dans les sociétés traditionnelles, avec  un esprit d’amitié et de solidarité»,  relève-t-il.  Toutefois, il attire l’attention des parieurs sur  les risques de dépendance et d’endettement liés au PMU’B.  «Le pari mutuel est un phénomène qui devait être suffisamment encadré par des psychologues au  Burkina, à cause de la dépendance qu’elle peut  générer  ou des risques d’endettement.  Les biens et le salaire  du parieur  peuvent y passer, et  conduire à des situations éprouvantes»,  fait-il remarquer.

Le Directeur général (DG) de la Loterie nationale burkinabè (LONAB), Lucien Carama,  se réjouit a priori que  sa société  fasse des millionnaires. «J’ai de réels motifs de satisfaction, car si on arrive à transformer des rêves en réalité, c’est qu’il y a une forte adhésion des clients aux produits de la LONAB. Et plus les produits se vendent bien, plus les rêves des clients deviennent réalités, et nous ne pouvons que nous en réjouir», avance-t-il.  Si le patron de la Nationale des jeux de hasard se félicite des échos favorables concernant certains gagnants, qui ont su bien investir dans  divers domaines (foncier, élevage, restauration, commerce etc.),  il  a aussi  conscience que d’autres ont échoué.  «Le constat est que certains gagnants n’arrivent pas à bien utiliser leur argent. C’est pour cela que la LONAB a signé un protocole d’accord avec la Maison de l’Entreprise du Burkina Faso pour conseiller et orienter les gagnants dans leurs projets d’investissement»,  affirme M. Carama.  Pour lui, il n’est  pas question d’abandonner les gagnants, après la remise de leurs gros chèques. «La LONAB est soucieuse du bon usage des fortunes qu’empochent les gagnants. Ce souci se matérialise non seulement par les conseils précieux qu’elle donne aux gagnants à la remise des chèques, mais également par l’orientation vers la structure habilitée à leur donner des conseils pour une bonne utilisation»,  souligne le DG.  Le partenariat entre la Maison de l’Entreprise et la LONAB, scellé depuis 2013, constitue  donc une lueur d’espoir  pour les gagnants, même s’il a besoin d’être dynamisé  davantage  comme le confient des sources introduites.

 

 

Kader Patrick KARANTAO

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Vous  avez  dit trucage ?

Dans le milieu du PMU’B, certains parieurs  sont  convaincus, sans même avoir la preuve,  que les arrivées des courses hippiques sont  arrêtées à l’avance en  France. Tout n’est  que formalité,  selon eux. «Faux !», rétorque le DG de la LONAB.  A l’écouter,  il  n’y a pas de résultats de courses arrangés avec leur partenaire PMU- France. «C’est pour crédibiliser nos jeux et rassurer davantage la clientèle que nous avons introduit les technologies de l’information et de la communication dans nos activités commerciales depuis 2005. Lesquelles permettent aux parieurs de suivre les courses à partir des hippodromes français, que ce soit au PMU’B ou dans les Espaces courses en direct (ECD). Tout le monde a la possibilité de vérifier les résultats des courses», précise-t-il.   Pour  lui,  il n y a pas de polémique qui tienne.  «La LONAB n’a aucun intérêt à truquer ou à falsifier les résultats des courses», martèle-t-il,  pour couper court aux spéculations. L’enseignant-chercheur au département de sociologie de l’Université Ouaga I Pr Joseph-Ki-Zerbo de Ouagadougou, Boniface Désiré Somé,  croit aussi à la sincérité des  jeux,  sans  pour autant  être naïf. «Je pense que la LONAB est assez sérieuse et intègre, et que les gains reflètent la réalité. Les parieurs ont de toute  façon un droit de regard  sur les paris. Toutefois, le  pari mutuel  n’échappe pas aussi aux pratiques  mafieuses comme  tout  milieu»,  clame-t-il.

 

K.P.K

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Des courses «made in Burkina» à l’étude

A quand l’organisation de courses hippiques au Burkina Faso ? Beaucoup de parieurs se posent cette question, vu que jusque-là,  les jeux se déroulent  sur des hippodromes français, à des milliers de kilomètres. Mais,    la Nationale des jeux de hasard a déjà une expérience en la matière, même si elle a tourné court. «La LONAB organisait des compétitions de courses hippiques à Ouagadougou. Compte tenu d’un certain nombre de contraintes, elle s’est vu obliger de suspendre ces courses.», rappelle le DG de la société.  Pour autant,  la LONAB  n’a pas renoncé  définitivement à l’organisation de ses propres courses. «Nous continuons la réflexion. Des études sont en train d’être menées pour une éventuelle relance des courses hippiques au Burkina Faso»,  rapporte-t-il.

 

K.P.K

Sidwaya

 

Mise à jour le Vendredi, 16 Décembre 2016 09:15
 

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