L’ambiance de la campagne électorale au Niger est aux derniers meetings dans les états-majors des partis politiques. Zoom sur l’ambiance dans les quartiers généraux de deux partis politiques qui s’accusent mutuellement de provocation. Il s’agit du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS Tarraya) de Mahamoudou Issoufou et le Mouvement démocratique nigérien (Moden Lumana) de Hama Amadou, incarcéré à Filingué.
Mardi 16 février 2016, dans l’après-midi au siège du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (PNDS Tarraya) dans le quartier Zabarkan de Niamey. Tandis que le président Issoufou est en campagne en région, le siège de son parti connaît une ambiance particulière. Musique à comble, vente de gadgets, défilé de grosses cylindrées, réunions de préparation du dernier grand meeting du président à Niamey, c’est l’atmosphère qui caractérise les locaux de ce siège à trois niveaux, du parti présidentiel. Le mot d’ordre sur toutes les lèvres, réussir le coup K.O sans coup férir. Du rez-de-chaussée au 3e étage, tout le monde est en mouvement et semble ne pas avoir le temps pour répondre à un journaliste. « Vous avez un rendez-vous ou bien vous avez parachuté comme ça ? », nous demande un responsable du parti. Nous lui répondons que nous sommes journalistes burkinabè. « Ah, c’est merveilleux, vous venez du Burkina », réplique ce responsable du parti qui semble avoir une admiration pour le pays et nous invite à le suivre chez le responsable à la mobilisation du parti, Assoumana Malam Issa, pour nous parler de la campagne. Entre appels incessants et sollicitations sur place, il nous reçoit. Selon le responsable à la mobilisation de la campagne du PNDS, la victoire du président sortant, Mahamoudou Issoufou ne fait l’ombre d’aucun doute au regard de l’organisation de l’équipe de campagne du PNDS et la mobilisation des citoyens autour du programme de société du candidat. A quelques jours de la fin de la campagne, Assoumana Malam Issa tire un bilan positif des périples du président sortant et se dit convaincu du coup K.O. « Selon le tirage au sort pour le positionnement des candidats sur le bulletin de vote, notre candidat est en 4e position et ce chiffre 4, nous le vendons partout où le président fait campagne. Nous disons que le président Issoufou fera le 4e coup K.O dans l’espace Afrique francophone après Alpha Condé de la Guinée, Alassane Ouattara de la Côte d’Ivoire et Roch Marc Christian Kaboré du Burkina Faso », indique sereinement le responsable à la mobilisation du PNDS. Selon lui, plusieurs facteurs œuvrent en faveur de ce coup K.O du président sortant. Il s’agit, à entendre M. Issa, du bilan positif de Mahamoudou Issouf, du soutien de 43 partis politiques dès le premier tour et la fiabilité de son programme de société qui constitue la continuité du programme du quinquennat passé. La réalisation de ce programme du président Issoufou, qui compte 8 axes, nécessitera, selon Assoumana Malam Issa, la mobilisation de 8 200 milliards de FCFA pendant le prochain quinquennat.
Hama Amadou, de la prison à la présidence ?
Du côté du siège de campagne du Mouvement démocratique nigérien (MODEN Lumana) de Hama Amadou au quartier Maison économique de Niamey, l’ambiance est aussi à la campagne. Vente de gadgets à l’effigie du candidat, réunions des membres du bureau politique et des sections, c’est ce qu’on observe dans la cour de cette grande villa qui fait office de QG de campagne de MODEN Lumana.
Le slogan de campagne est «Hama Amadou, de la prison à la présidence ». L’incarcération du président du parti n’a pas entamé la détermination des militants du parti à faire du prisonnier de Filingué le président nigérien au soir du 21 février 2016. Le MODEN Lumana est l’un des partis politiques de l’opposition signataire de la Coalition pour l’alternance 2016 (COPA 2016), avec le Mouvement national pour la société de développement (MNSD NASSARA) de Seini Oumarou, le Mouvement des Nigériens pour le renouveau démocratique (MNRD) de Mahamane Ousmane et l’Union pour la démocratie et la République (UDR-Tabbat) de Amadou Boubacar Cissé. Pour le directeur national de campagne du MODEN Lumana, Youba Diallo, l’absence du président Amadou n’a pas désorganisé la campagne du parti. « Notre président est arbitrairement détenu en dehors de toute procédure judiciaire. Le pouvoir pensait créer un préjudice à notre parti. Bien au contraire, c’est l’effet inverse qui s’est produit. En voulant casser Lumana, on a rehaussé l’image du parti sans le savoir », soutient Youba Diallo. Et d’ajouter : « Ceux qui ont arrêté Amadou connaissent sa capacité de mobilisation, c’est un homme d’Etat. Nous continuons la lutte et la campagne est bien menée. De la prison, le président continue de gérer le parti et ira à la présidence de la République ». M. Diallo est sûr de la lutte de son candidat malgré sa détention.
Sur le terrain, le PNDS et le MODEN s’accusent mutuellement de provocation et d’agressions de militants. Selon le responsable à la mobilisation du PNDS, Assoumana Malam Issa, plusieurs incidents ont été constatés entre les militants de son parti et ceux du MODEN. Pour lui, le parti de l’opposant Amadou cherche à troubler les élections parce qu’il sait qu’il va perdre. Pour démontrer ce qu’il appelle attitude belliciste des militants de Lumana, Assoumana Malam Issa cite, entre autres, le refus du parti de signer le code de bonne conduite relatif aux élections, l’agression d’un militant du PNDS suivi du cabossage de son véhicule par les militants de Lumana et l’obstruction par ceux-ci du passage du cortège présidentiel. Mais Abdoul Aziz Issa Daouda du MODEN rejette en bloc les accusations et estime que c’est au contraire le parti du président sortant qui provoque les militants de son parti. Il en veut pour preuve l’arrestation du président, les tentatives d’intimidations des membres du parti. « Le message de notre président est de ne pas céder à la provocation. Si sa victoire devrait se construire sur un terrain violent et sanglant, Hama Amadou préférait la défaite », soutient M. Daouda.
Lassané Osée OUEDRAOGO
Envoyé spécial à Niamey
Sidwaya |