On ne dira pas qu’Oscar Pistorius, ce handicapé champion des Jeux Olympiques d’entre les non-handicapés, n’aura pas connu l’adversité. Né sans péronés et plus tard amputé des deux jambes en dessous des genoux afin de lui permettre de marcher avec des prothèses, il est devenu champion olympique chez les valides. C’est un truisme de dire qu’il a connu la gloire dans son pays (l’Afrique du Sud) et même ailleurs. Mais un funeste jour de Saint-Valentin, le 14 février 2013, moment où l’on est censé célébrer l’amour à travers des relations fusionnelles, il tuait sa compagne, Reeva Steenkamp, avec un pistolet.
Et ce fut presque une descente aux enfers pour lui. Placé d’abord en garde-à-vue, il est, le lendemain du tragique événement, formellement inculpé pour le meurtre de Reeva Steenkamp par le tribunal de Pretoria. Durant le procès, il videra toutes les larmes de son corps, soulignant qu’il aurait pris sa femme pour un cambrioleur. Il n’a pas fallu longtemps pour que cet argument s’effondre pour faire face à une explication toute aussi sujette à caution : il admettra avoir tiré des coups de feu sur sa compagne, mais qu’il s’agit malgré tout d’un accident.
Depuis la reprise du procès, la nation arc-en-ciel était suspendue aux lèvres de la juge Thokozile Masipa qui, le long du procès, a toujours gardé un air impénétrable. Avec elle, il se susurrait que celui qui était considéré à la belle époque comme un héros national en Afrique du Sud avait peu de chances de sortir totalement blanchi de cette affaire, d’autant que celle qui va décider de son sort est réputée être féministe dans l’âme, ardente avocate des droits de l’autre moitié du ciel. Et pourtant, aux dernières nouvelles, l’on a appris que Pistorius a été acquitté par la juge des accusations de meurtre. De ce fait, il échappe à la prison à vie. Reste l’homicide involontaire ou l’acquittement. Au grand dam des ligues de protection des droits des femmes.
Mais une chose est sûre, même libre, il s’agira d’un destin brisé pour l’homme qui se définit lui-même comme «la chose la plus rapide sans jambes ». Il se remettra difficilement de l’épreuve. Lui qui s’est déjà ruiné en vendant une bonne partie de ses possessions pour sa défense et qui n’a plus la confiance de ses sponsors, qui vont toujours vers le cheval gagnant. Quelle déchéance pour celui qui était, selon le Time Magazine (un journal britannique), de la liste des cent personnalités les plus influentes au monde ! «Comment pouvez-vous avoir le culot de me demander comment je me sens en ce moment?», avait-il en toute logique répondu aux journalistes qui faisaient récemment le pied de grue devant sa résidence.
Issa K. Barry
L'observateur paalga |